dimanche 1 décembre 2013

celui qui suit

le soleil est bien bas
dans ma brume je ne sais où me situer
ma montre est cassée depuis bien longtemps
remonter les aiguilles ne serviraient qu'à les planter dans mon bras

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

pas besoin de rouler sa bosse
pour défigurer ma trogne
j'me ravage depuis tant et tant
sans aucune violence, juste du passage
les regards qu'on me porte ne me croisent pas
les oreilles qu'on me prête ne m'écoutent pas

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

tout glisse, tout me glace
j'me quitte, j'vous casse
dans ma bulle le son ne parvient pas
je suis un muet, rien ne sort de ma tête
je suis un mulet, un croisement abjecte
un rejeton, j'me remets à vous
j'vaux pas un sou, la machine est hors tension

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

j'me dis lève toi, crève et marche
un mort-vivant
sans mot, sans sang, sans rang
même l'au-delà impair et passe
à la roulette du temps, j'crasse
le jais-manteau ne veut salir sa faux

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

j'hurle
à qui veut croiser mon ombre
aux cratères du ciel,
à la famine de mes relations
à ce foutu monde qui m'a vu crier
les joues tannés par ce premier feu

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

pas pire, sûrement pas mieux
j'm'invente des crimes, les plus odieux
histoire de trouver une raison
une clarté dans cette ombreuse existence
c'est mon enjeu, mon héritage
contrat mental, j'ai signé, lancé les dés

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

j'commence à le haïr
de l'autre côté de mon hémisphère
j'le vois sourire, 
pour qui au final
émaillé
ébréché
éméché 

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse

vouloir être n'a plus de sens
croire être n'a pas d'existence
ronge-être, perfide substance
matière grise, j'te méprise 
panser et penser
jumeaux terrifiants
trafiquants d'âme
j'rend mon arme
plus de munitions pour m'en sortir
barillet vide dès le début
je n'ai jamais voulu
m'en sortir
créant mon propre collet
linceul, l'un seul
l'autre me substituant

j'marche dans les pas 
dans celui qui devait les suivre
j'marche dans les pas 
dans celui qui devait les suivre
j'marche dans les pas 
dans celui qui devait les suivre

j'me casse, j'me cogne
et j'encaisse
l'homme-ombre continue d'avancer
sans être vu
endossant le manteau
de sa propre noirceur



3 commentaires:

Cmoimanu a dit…

J'ai lu ça oui y a quelques jours.
Si je le trouve très (trop) déprimant à mon goût, il est super bien écrit !

Anonyme a dit…

Vois tu vraiment l'oreille que l'on te tend ? Entends tu mon regard posé sur ta peau ? Tu t'isoles. J'te laisserai pas faire. J'te casse tu m'cognes. J'encaisse
Bon retour parmi nous Sam
Annln

Nairolf a dit…

Je viens de relire ce texte
Un très beau texte
Avec de sacrées trouvailles...
Il regorge de puissance
De souffrance aussi.
Bravo, mon ami Sam.
Tes mots sont beaux...
Et bruts et vifs aussi...